Et une histoire triste ...

Mon père m'aimait. Enfin, c'est ce qu'il prétendait. Il me battait souvent en réalité, depuis la mort de ma mère. Ma mère. Elle était parfaite, adorable, gentille, drôle, jolie. Je l'aimais plus que tout. Quand j'avais 10 ans, elle est tombée enceinte, j'allais être grand frère, à la maison, c'était la fête, ils essayaient depuis des années d'avoir un autre enfant, et ils avaient juste abandonnés. Puis elle est tombée enceinte. Tout le monde était heureux, tout allait bien. Puis tout est parti en cacahuètes. Lors de l'accouchement, il y a eu un souci. Je n'ai pas compris sur le moment ce que les médecins nous racontaient, à mon père et à moi. Mais soudain, il est tombé au sol, en hurlant et pleurant. Alors j'ai su. Elle n'avait pas survécu. Elle était morte en couche, et le petit bébé, il n'avait pas survécu non plus. Je me retrouvai seul avec mon père. J'avais cru stupidement qu'il serait là pour moi, et moi présent pour lui, qu'on se soutiendrait, et qu'on pourrait toujours compter l'un sur l'autre. Putain, si j'avais su ! Je me serais tiré en vitesse, du haut de mes 10 ans et demi. Il n'a pas commencé tout de suite, non au début, il se contentait de boire, d'oublier de faire les courses, et des choses comme ça. C'est vers mes 14-15 ans qu'il a commencé à se montrer vraiment violent. Il rentrait du boulot, il avait eu une mauvaise journée, il avait eu une amende, ou bien, il s'était fritté avec quelqu'un, j'en prenais une. Une, pas un simple coup, nan, une raclée, carrément. J'allais en cours, couvert de bleus, je prétextais faire de la boxe, du rugby, et autre. Je ne voulais pas le balancer, il était ma seule famille. La seule personne qui me restait. Et malgré tout ce qu'il me faisait, je l'aimais. J'étais pas le genre faible, et à me laisser faire, et bien vite, je me suis défendu contre lui, je ne voulais pas le blesser, juste le stopper. Une fois cela fait, je m'enfermais dans ma chambre, et je ne ressortais que le matin, pour aller en cours. A l'école, j'étais plutôt… adulé. Beau gosse, plutôt coureur de jupons, j'attirais beaucoup de filles dans mes bras, dans mon lit. Les sentiments, très peu pour moi, vu comment mon père à tourner à cause de cette merde. En cours, j'avais facile, très facile, alors je m'amusais en classe, je faisais chier les profs, tout ça. J'aimais jouer au rebelle par moments, prouver que je n'étais pas juste le punching ball de mon père, que moi aussi je valais. Je ne me battais pas, ou presque pas en cours, même si l'envie ne m'avait pas manqué parfois. Puis le lycée s'est terminé, et la vraie vie a commencé. J'avais un peu d'argent de coté, et j'ai réussi à me tirer de chez moi, et à m'inscrire à la fac du coin. J'ai commencé des études de médécine, et puis je me suis amusé, j'suis sorti, j'ai fait la fête, j'ai un peu travaillé malgré tout. La fac, c'était pas si mal, j'avais toutes les libertés que je voulais vu que j'habitais seul. Mon paternel, j'lui ai dit au revoir sans me retourner. En fait, j'lui ai laissé un mot. "J'ai de l'argent, j'en ai marre de cette vie. Au plaisir -oupas- de te revoir."
Simple, concis, clair. Je me suis tiré, mon sac sur le dos. Entre mes études, j'ai enchaîné des petits boulots, serveur, barman, danseur, modèle pour des cours d'art,… Enfin, ce genre de chose. Avec cet argent, j'avais prévu un truc fou, un voyage. Je n'étais jamais parti en voyage, et j'avais envie de voir du pays, du monde même. J'ai choisi une croisière, rien de mieux pour visiter plus qu'un seul pays. Le Queen Mary II. Pourquoi ce bateau ? Ma mère s'appelait Mary, j'ai prit ça comme un signe. Un putain de signe ouai. J'me suis retrouvé coincé sur une île. Un signe de mauvais augure. Elle est morte, et j'vais crever aussi, seul sur une île déserte. C'est ce qu'on peut appeler une vie de merde.