Le Queen Mary II venait de me larguer sur cette île désertique, au milieu d'une prairie, sans aucune trace de vie. Incrédule, je fis quelques pas prudents. Les brins d'herbes verdoyants s'écrasaient sous mes chaussures, inadaptées à un tel lieu. J'entrepris d'avancer jusqu'à trouver un changement de paysage, mais cette étendue me paraîssait infinie. Trop perturbée, je n'avais pas encore réfléchi à comment je comptais me sortir de là, ni à ce qui pouvait se passer. L'idée des dangers et de tout ce qui était vital n'était pas arrivée à mon esprit, du moins pour l'instant.
Sur le bateau, les températures étaient basses. Je cumulais donc un bon nombre de couches vestimentaires. Ceci me serait peut-être utile ... je ne le savais point. Seulement, ici, le soleil brillait de mille feux et je commençais à sentir les rayons sur ma peau. Une pause était bienvenue ...
Au milieu de toute cette verdure, je découvris un petit rocher qui surplombait tout le reste. J'y posa mes fesses et enleva la plus épaisse de mes vestes. Je me sentais déjà mieux ... Quand tout à coup, je vis la terre s'agitait.
« Qu'est-ce ? », murmurai-je, horrifiée.

Artémis marchait lentement dans la prairie. Elle avait besoin de prendre un bon bain de soleil, lui qui avait été si peu présent ces derniers temps. Mais si en règle générale le temps était plutôt beau sur l'île, le soleil ne tapait pas aussi fort qu'aujourd'hui.
La brunette cherchait des yeux un endroit ou elle pourrait se poser pour faire bronzette. Mais malheureusement pour elle, mis à part de l'herbe, de l'herbe et encore de l'herbe, il n'y avait rien d'autre que... de l' HERBE.
Un bruit inconnu la fît sortir de ses réflexion. Elle releva la tête à la recherche de l'origine de ce bruit. « Il y a quelqu'un ? »

Je perçus un léger bruissement, ce qui rendit les choses encore plus étranges. Cette chose qui semblait vivante et enfouie dans la terre se mettait à parler ? Une frisson me parcourut. J'en conclus qu'il était préférable de bouger. Faire un tour ailleurs ne me ferait pas de mal ...
Après plusieurs pas, je me souciais de l'heure. A quel moment de la journée étions-nous ? Y avait-il âme qui vive sur cette île ? Combien de temps allais-je rester ici ? Est-ce que je parviendrais à survivre ? Les questions se bousculaient dans ma tête, quand mes pensées revinrent à ce "truc" bizarre. Si quelque chose de bien réel était sur cette île, c'est qu'il y avait un moyen de se nourrir. Soudain, il me tardait d'en découvrir plus. Je continuais donc à m'éloigner de mon précédent lieu, sans pour autant savoir où j'allais.

Artémis était toujours aux aguets ne comprenant toujours pas l'endroit duquel venait le bruit. En même temps, avec tous ces bruns d'herbes il était bien difficile d'y voir clair dans cette prairie. Ce n'est juste qu'au moment ou elle aperçut une silhouette féminine au loin qu'elle arrêta ses recherches.
La jeune femme au loin - ou plutôt jeune fille - était de dos, ce qui empêchait Artémis de voir son visage. Curieuse, elle s'approcha de l'inconnu aux cheveux bouclés. Arrivée à mis hauteur, elle demanda : « Vous cherchez quelque chose ? »

J'avançais à pas lents, quand je discernais une voix. Cette fois, celle-ci était bien plus nette et je pouvais reconnaître celle d'un humain. Avant de m'emparer de quelconques doutes, un sentiment d'espoir m'envahit. Je m'apprêtais à me retourner, quand une chaleur étouffante me fit suffoquer. C'est alors que je m'écroulai au sol, inerte. Sans doute la chaleur du soleil m'avait fait faire un malaise ou le changement de température que j'avais ressenti subitement.

Alors qu'Artémis était en tain de s'approcher de l'inconnue, elle vit celle ci s'écrouler d'un coup sur le sol. Elle courut jusque la jeune femme et... HORREUR. C'était sa sœur. Elle commença à sangloter se mettant à genoux à côté de sa sœur, soulevant sa tête d'un bras. « Emma, Emma, je t'en supplie réveille toi. » Elle était complètement désemparée devant cette situation. Que venait donc faire sa soeur ici et pourquoi avait elle fait un malaise ?

Je remuai dans mon "sommeil". J'étais encore totalement inconsciente.
Puis, le ciel s'assombrit et une fine pluie tomba. Je crois que ce rafraîchissement et ces quelques gouttelettes m'avait revigorée. C'est alors que j'entrouvris mes yeux, et clignai faiblement des paupières. Ce que j'avais vu cette fraction de seconde m'était apparu flou. Je réussissais seulement à distinguer une personne et à prononcer avec difficulté ces deux mots :
« Aidez-moi ».

Artémis n'en revenait toujours pas. Les larmes courraient sans s'arrêter sur ses joues. Le ciel s'assombrit soudain et une pluie fine commencait à s'abattre sur elle. « Manquait plus que ça.. » Marmona-t-elle dans sa barbe. Soudain, elle vit sa soeur ouvrir lentement les yeux puis les refermer. Elle attrapa la main de la jeune fille et la serra de toute ses forces. « Emma, je t'en supplie, reste avec moi ! »

Je fus soudain prise d'une force nouvelle et me relevai d'un coup. Ayant entendu les dernières paroles de l'inconnue, je lui répondis sèchement :
« Non mais vous croyez que j'allais mourir ?! »
Suite à ça, je me remis sur mes jambes et m'en alla sans même me retourner, furieuse. Je marchais d'un pas décidé, sans savoir où je me dirigeais, une fois de plus.

Artémis ne savait pas quoi faire. Elle était comme perdue au mileu de cette marée verte avec sa soeur, sortie d'on ne sait où sur les bras. C'est alors que la blondinette se releva, sermonna sa grande soeur comme si elle ne la connaissait pas et partit de l'autre côté de la prairie.« Oh oh Emma, attends moi ! » Elle n'y comprenait plus rien. La prenait elle pour une inconnue ?

Alors que je continuais mon chemin, j'entendis mon prénom. Emma ? Qui connaît mon prénom ici ? pensai-je. Déconcertée, je me décidai enfin à me retourner. Une jeune femme me regardait au loin, l'air désespérée. Je n'étais pas assez près pour apercevoir quelconque trait de son visage, mais sa silhouette mettait familière. Je me contentai donc de crier assez fort pour qu'elle puisse m'entendre :
« Qui êtes-vous ? »

Artémis devenait blême. Mais qu'était il arrivé à sa soeur pour qu'elle ne se souvienne pas d'elle ? Etait elle tombée sur la tête lors de son malaise ? Artémis s'effondra sur le sol, se demandant ce qu'elle avait fait de mal pour mériter une vie pareille ? « Emma... c'est moi.. ta soeur. »

A ces mots, Emma s'approcha de l'individue. Un soulagement l'envahit, comme de nombreuses questions. Qu'est-ce que sa chère soeur pouvait faire ici, dans ce lieu pomé ? Depuis combien de temps était-elle là ? Qu'y faisait-elle ? Pourquoi m'avait-elle dit qu'elle comptait faire un court voyage, alors que ce n'était visiblement pas le cas ? Elle en profita pour lui chuchoter quelques paroles réconfortantes :
« Artémis, excuse-moi, je ne t'avais pas reconnue. Que fais-tu ici ? Es-tu consciente ? M'entends- tu ? Je ne voulais vraiment pas te faire de peine, si seulement j'avais su que c'était toi ... Mais pense à ce qu'on a pu ressentir, moi et mon frère, quand tu ne revenais pas. On croyait que tu nous avais abandonnés, que tu en avais marre de te charger de nous depuis toutes ces années. »
C'est alors que la jeune fille se rendit compte qu'elle était en train d'exposer sa vie, ses sentiments, ses ressentis à celle-ci, alors qu'elle n'était même pas sûre qu'elle soit en mesure de l'écouter. Elle attendit donc une réponse, les yeux en point d'interrogation.

Quand elle vit sa sœur se retourner et venir vers elle, ce fut un énorme poids qui s'élevait de ses épaules. Elle poussa un énorme soupir de soulagement avant de prendre sa sœur dans ses bras et de la serrer du plus fort qu'elle le pouvait. Elle était tellement heureuse et en même temps si abasourdie par ce qu'elle était en train de vivre qu'elle n'écoutait pas sa soeur. Elle se contentait de profiter de l'instant, qu'elle avait penser ne plus jamais revivre. « Je ne t'abandonnerais plus jamais ma chérie, plus jamais je te le promets. »

Quand sa soeur la prit dans ses bras, elle fut surprise. Cela faisait tellement longtemps qu'elle ne l'avait pas vue, qu'elle ne l'avait pas touchée, qu'elle ne lui avait pas parlée. Elle pourrait enfin vivre à ses côtés, comme avant, en sachant qu'elle serait là pour l'aider, la protéger et la réconforter. Emma la serra à son tour, et ne put retenir une larme de joie.
« Tu m'as manquée grande soeur. »
La blondinette plongea son regard dans celui d'Artémis. Il pétillait de bonheur.

Alors que la pluie redoublait de violence, elle demanda :
« Connais-tu un endroit pour nous abriter ? Je suis trempée jusqu'aux os. Tu pourras aussi m'expliquer comment tu es arrivée là et ce que tu y fais. »
Sur ce, elle partit chercher sa veste qu'elle avait laissée non loin de là.

Effectivement, la pluie n'avait pas l'air ni l'intention de se calmer. Elle réfléchit un instant avant de repenser à une petite grotte, à quelques minutes d'ici. « Tu es prête à marcher 5 minutes ? » Elle la serra dans ses bras, puis passa un bras autour de son cou et commenca à marcher dans la bonne direction.

« Si il le faut, je marcherai », répondit-elle simplement.
Sa tenue, n'étant pas appropriée à ce lieu, ni à cette météo, était recouverte de boue. Emma marchait, tandis que ses pieds s'enfonçaient dans la terre humide. Elle manqua de chuter, mais se rattrapa juste à temps. Cependant, elle reçut plusieurs éclaboussures sur le visage, et elle doutait que sa soeur eut réussie à les esquiver. La filette s'excusa d'un regard, mais ne put réprimer un petit sourire malicieux.

La terre était devenue de la boue et marcher devenait de plus en plus dificile. La pluie se déchainait encore lorsqu'elles entrèrent dans la grotte qui malgré les gouttes qui s'infiltraient, restait un abri confortable à côté de ce qu'on pouvait vivre dehors. « On est mieux là quand même. »

« Oui, c'est vrai ! » chuchota-t-elle, souriante.
Elle était toujours sous le coup de l'émotion, heureuse d'avoir retrouvé Artémis.

« Bon, maintenant tu m'expliques ce que tu fais là. » dit-elle en essorant ses cheveux puis ses vêtements.

« Tu me dois aussi des explications ! », rétorqua-t-elle.
Puis, d'une voix plus douce elle ajouta :
« J'étais simplement venue te retrouver. »

« Mais les grands parents ils n'ont pas du s'en remettre que tu partes ! Comment ils vont ? » Elle reprit son souffle et continua. « Pour moi, rien de plus simple au lieu d' attérir aux Etats-Unis bah je me retrouve coincée sur cette île comme toi désormais. »

Etant très étonnée, la fillette en profita pour lui demander :
« Cela fait combien de temps que tu es ici ? Et tu as réussi à survivre ? Raconte-moi tout stp ! »
Elle parlait d'un ton suppliant et une lueur d'impatience comme d'excitation brillait au fond de ses prunelles. Elle qui croyait que sa soeur avait donné une fausse destination pour avoir la paix ... Elle semblait se tromper sur toute la ligne.
Puis, elle attrapa la main de sa frangine et la serra contre elle.
« Oh ... Ils vont bien. Je dirai plutôt qu'ils ne se remettaient pas que tu ne reviennes pas, eux aussi, ils croyaient que tu nous avais délaissés ! Grand-père ne m'en voulait pas, il comprennait que je veuille te retrouver; tandis que grand-mère était inquiète, elle avait peur que je ne rentre pas chez nous, que je prenne ma liberté. C'est d'ailleurs ce qu'elle va penser, si nous sommes condamnées sur cet archipel ... Par contre, Samuel était triste que je m'en aille. Il se retrouvait seul, au milieu de ces vieux, surtout quand des amis leur rendaient visite et que ça discutait de tout et de rien. Je reconnai que les conversations des personnes âgées ne sont pas toujours passionnantes pour des petits garçons comme lui. D'un côté, je le comprenais, mais personne n'aurait pu me retenir ... »

« Je ne vous aurais jamais abandonné toi et Samuel. Vous étiez plus que mon frère et ma sœur. Vous étiez mes petits anges adorés que je n'aurais laissé pour rien au monde. Je vous aime trop pour ça. » À ces mots, elle posa deux baiser sur la jour de sa blondinette de sœur. Elle tenait comme la prunelle de ses yeux à elle.

L'adolescente baissa la tête suite à ces paroles et à ces deux baisers, rougissant légèrement, un petit sourire en coin. Puis elle se releva et s'exclama :
« C'est pas pour dire, mais je commence à avoir faim ! »