Promenons-nous dans les bois, attention le loup est là ! [Lizzie]

C’était une journée humide, le brouillard était intense et filtrait les rayons solaires avec une telle audace qu’il nous était permis de le fixer directement. Démuni de son éclat puissant, il était semblable à un abricot desséché, rond, doux mais sans saveurs. La brume planait dans la forêt, opaque, fantomatique, comme un régiment de spectres hantant les lieux. Cela devait faire environs une heure que Revan marchait sur les sentiers. Son nez avait récolté une multitude d’odeurs plus agréables les unes que les autres. Il s’était plu à traquer les empruntes d'un troupeau de chevaux sauvages qui descendait les bois comme un gisement sur les flancs d'une montagne. A mesure que ses recherches l'entraînaient dans les profondeurs du bois, le don de pisteur qu'il s'était découvert depuis son arrivé sur l'île ne fut point suffisant pour retrouver le troupeau. Cependant, ses pas le conduisirent vers une toute autre créature dont la beauté avait tous les atouts pour rivaliser avec ces splendides équidés. Une jeune femme se tenait au beau milieu de toute cette flore. Elle ne semblait pas se confectionner un bouquet de fleur, non, à en juger par son comportement, elle semblait étudier les plantes des environs. Revan s'approcha doucement puis s'adossa à un chêne. En la voyant ainsi, un célèbre poème lui revint en tête, celui de Pierre de Ronsard. Il fit défiler les premiers vers dans sa tête :

Mignonne, allons voir si la rose
Qui ce matin avait déclose
Sa robe de pourpre au soleil,
A point perdu cette vêprée,
Les plis de sa robe pourprée,
Et son teint au vôtre pareil

- Une fleur parmi les fleurs. Celle que j'ai choisi se laissera t-elle cueillir ?

S'il avait pu paraître poétique un bref instant, ce ne fut que dans ses songes, car sa phrase, au contraire, pouvait paraître déplacée quant à son sens ambigu. Il lui adressa un étrange sourire mesquin.

PUF : polg Messages : 99 Date d'inscription : 19/05/2012

Arrivée sur cette île depuis peu, Elizabeth avait du mal à se faire à cette nouvelle vie. Tout cela ne lui semblait encore qu’éphémère, comme si bientôt elle pourrait échapper à ce cauchemar. Mais sa raison songeait tout autrement aux événements. Elle était condamnée. Elle le savait. Mais elle n'en était pas consciente. Alors pour gérer ce conflit interne, elle avait décidé de s'abandonner à sa passion. Oubliés les survivants et leurs histoires dans ce huis-clos. Oubliés les problème d'hygiène et de beauté -comment allait-elle s'épiler ? elle DEVAIT trouver une lame ! Oubliés ces rayons du Soleil qui menaçaient sa peau pâle. Elle s'était trouvé un coin ombragé dans la verte nature, sous les branches feuillues de cette végétation tropicale. Qu'y faisait-elle ? On aurait pu croire qu'elle avait quelque roman à l'eau de rose dans une poche, et qu'elle avait donc le précieux manuscrit en sa possession sur l'île. Mais il n'en était rien. La lecture ne la passionnait pas, elle préférait étudier les plantes. Il lui fallait quelque-chose pour au moins se laver correctement les cheveux, et puis aussi s'hydrater. Ensuite on verrait pour trouver des herbes médicinales. C'était important aussi, mais pas une priorité dans la mesure où personne n'était malade. Du moins c'est ce qu'elle avait pu constater depuis son arrivée.

Elle s'était "attaquée" à une plante jaune aux longs pétales pointus lorsqu'une voix masculine se fit entendre dans son dos. Cette présence la fit sursauter et elle se retourna.

- Oh, vous m'avez fait pe... Plait-il ?

La fin était presque étranglée. Qui était cet homme pour oser prononcer de telles paroles en guise de phrase de salut ? La prenait-il pour une fille facile ? Était-ce un tournage caméra caché d'un porno ? Elle fronça les sourcils et lui répondit, le regard menaçant.

- Certaines plantes sont vénéneuses. D'autres ont des piques. Il arrive parfois qu'elles aient les deux.

Au lieu de s’excuser de l’avoir ainsi surprise, il élargit son rictus, ses yeux bleus accrochés sur le petit bouton de rose qui, malgré son jeune âge, se voyait déjà bardée d’épines acérées et venimeuses. Elle n’hésita d’ailleurs pas à cracher son venin sur l’homme qui s’était montré malséant avec elle. Ses sourcils se perchèrent en haut de son front, voilà une fleur de qualité ! Ca n’avait rien à voir avec les mauvaises herbes qu’il croisait à longueur de temps dans son camp. Ca lui plaisait…Il se frotta le coin droit de sa lèvre avec son pouce puis se remit à sourire.

- Vous savez le danger est partout ici, permanent. Nous avons creusé notre tombe le jour où nous avons mis le pied dans ce navire fantôme. Nous ne savons ni comment ni quand la mort nous fauchera, et comme je ne me rappelle pas vous avoir vu lors de ma croisière, je constate que vous êtes une nouvelle arrivante sur l’île. Si vous tenez à rester en vie, je vous suggèrerai de rengainer vos piques et de ravaler votre poison en épargnant la mienne. Qui sait, je pourrai peut-être être l’homme qui suis sensé vous venir en aide.

Tout en s’adressant à « la jeune fille aux fleurs » sur un ton tantôt solennel, tantôt dédaigneux, il se rapprocha lentement d’elle, les mains nouées dans son dos. Il avait laissé son long manteau au camp et ne portait qu’une espèce de chemise noire en colle V suivi d’un pantalon tout aussi noir qui s’engouffrait dans ses bottes de couleur identique. Il se fraya un chemin parmi la végétation, ne se souciant guère du sort des petites fleurs qu’il pouvait écrabouiller au passage. Il s’arrêta à sa hauteur et se redressa dignement, ce même sourire hypocrite aux lèvres.

- Alors, quel nom dois-je poser sur ce ravissant visage ? « Bouton d’Or » me plaît assez, mais je n’aime guère rester trop longtemps dans l’ignorance.

PUF : polg Messages : 99 Date d'inscription : 19/05/2012

Le problème lorsqu'on était une fleur, c'était qu'on se faisait attaquer ou butiner par des insectes indésirables. Bon, parfois cela permettait d'éparpiller du pollen et de faire des "bébés fleurs". Mais beaucoup d'insectes n'étaient pas pétris de bonnes intentions et finissaient par vous manger les pétales. Ou alors, et là ce n'était pas trop de leurs fautes, ils attiraient des oiseaux ou autres prédateurs à eux... qui en chassant vous détruisaient. Ainsi, vous, petite merveille de la nature, finissiez vos jours en tant que dommage collatéral causé par le grand cycle de la vie et sa fameuse chaîne alimentaire.

- Je vois que vous êtes d'un optimisme rayonnant. Éblouissant, même.

Un véritable Soleil dans sa vie. Qui par sa lumière et sa présence réchauffe, rassure et permet de s'épanouir.
Elle lui adressa un grand sourire ironique estampillé Colgate (ou Signal, ou Email Diamant). Ce n'était pas parce que ses vêtements lui conféraient une classe des plus appréciables qu'il devait se prendre pour quelqu'un. Mais voilà, au fond il n'avait pas tort. Sauf que cela, Elizabeth ne s'en était pas rendue compte. Elle n'avait fait que peu de rencontres sur cette île. Elle n'avait pas revu ce vieux coup qui la traiterait comme une bouse alors qu'ils se retrouvent tous les deux dans le même panier. Elle n'avait pas non plus rencontré cette peste brune qui lui ferait des misères par pure idiotie. L'homme, s'il n'était pas des plus sympathiques, avait au moins le mérite de lui accorder une certaine forme de respect.

- Rose, lui répondit-elle. Ce n'était certes pas son vrai prénom, mais elle n'avait pas envie de lui dire. Alors elle avait opté pour celui-ci. Le nom d'une fleur, mais aussi une référence à sa culture, la culture anglaise.

- Ne vous avisez jamais de m'appeler "Bouton d'Or", Monsieur.

Elle n'était pas du genre à aller rencontrer les ours. Le sentant bien trop proche d'elle, elle se leva et alla inspecter quelques branches à hauteur d’œil qui se trouvait plus loin.

- Oh, et je vous prierais de faire attention à où vous mettez les pieds, continua-t-elle sèchement sans se retourner.

A quoi bon se leurrer ? Préférait-elle un mensonge à la dure réalité dans laquelle ils pataugeaient ? Le fait était là, ils étaient abandonnés sur un territoire hostile et sauvage, où la nature régnait en maître. Il la fixa et haussa les épaules.

- Vous ne pensiez tout de même pas avoir débarqué au Pays de Candy quand même ?

Puis il ricana, ses mains dénouées, s’aventurèrent dans un petit nuage verdoyant de feuilles où ses doigts se permirent de prendre l’une d’elles en otage. D’un geste presque naturel, il entortilla la feuille autour de son index, son regard toujours posé sur la jeune femme en signe de défit. Finalement, elle céda et commença à s’ouvrir à lui en lui donnant son prénom. Il trouva cela trop facile, il l’avait fait remarquer auparavant, cette femme n’avait rien en commun avec toutes les autres femelles qui grouillaient sur l’île. D’ailleurs, il n’avait jamais autant oublié le sexe depuis qu’il avait débarqué sur ce morceau de terre tropical flottant. Revan songeant à la possibilité que ce prénom ne soit qu’en réalité un pseudonyme, un nom d’emprunt. Pour ça, il lui faudrait mettre le nez dans ses papiers personnels, si tant elle se balladait avec autre chose que des produits cosmétiques dans son petit sac chic. Comme en ces lieux, ce petit outil de femme perdait de sa valeur. Si à une époque il paraissait beau et clinquant, fondu dans ce paysage paradisiaque et attaqué par l’air iodé et l’agressivité du sable, il n’avait plus rien d’élégant.

- « Rose » toujours plus sensuel que « Marguerite ».

Une touche d’humour pour détendre l’atmosphère ? Non ? Encore fallait-il que la belle s’y prête, mais après tout, comme lui en vouloir si elle daignait conserver un air détaché après sa conduite de tout à l’heure ?
Ah les menaces ! Il était familier aux menaces pour en avoir reçu un grand nombre et des deux sexes. Pour les hommes, il s’arrangeait pour que ces Messieurs repartent les pieds devant mais pour ces Dames…ah…programme gymnastique dont on connaît tous l’issue : tout ça se réglait au corps à corps que l’on conclut d’un bouche à bouche.

- Comment ça, « Bouton d’Or » ? Il se plaqua une main sur la bouche, simulant une fausse surprise, les yeux pleins de malice. Oh vraiment ! Je suis confus.

« Rose » se leva et se dirigea à l’opposé de Revan comme si elle avait remarqué son approche. Il profita qu’elle ait le dos tourné pour observer sa silhouette svelte et élancée. Après tout c’était un homme, quand c’était beau, il regardait. Les fleurs se plaignent t-elles d’être ainsi dévisagées, touchées, arrachées/cueillies ou piétinées, larguées dans un vase et senties à longueur de temps ? Non ? Bon alors il avait bien le droit de laisser son regard s’égarer puis ce que l’on ignore ne nous fait pas de mal ? Quand il revit son profil, il détourna son regard vers ses empruntes, constatant l’étendue des dégâts. Il crispa son cou un instant ; « oups » ! Sincèrement ! Vous pensez réellement que le sort de ces brindilles lui importe ? C’était simplement pour faire bonne figure qu’il se déplaça vers la droite, s’arrangeant pour se rapprocher d’elle tout en épargnant les fleurs. Il songea un instant à son conseil…

- Si seulement nous avions pu être alerté par cette mise en garde lorsque nous avons emboîté le pas sur la passerelle qui nous entraînait sur le bateau…

» Dans un mois - Trop longs ! - Dans trois semaines - Okey !
» le loup arrive avec 3 feuilles de salade
» Où sommes nous ?
» Choisir serait nous trahir.
» Elle a bâti un pont entre nous et le ciel.

Promenons-nous dans les bois, attention le loup est là ! [Lizzie]

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