Monument et désespoir..

Cela faisait qu'une seule nuit que le Queen Mary nous avait déposé. Ce fut une surprise lorsqu'il manqua au rendez-vous. Et oui, le paquebot n'était pas revenu nous chercher. Pas que Maii soit pessimiste, seulement, contrairement aux autres, elle savait qu'il n'allait pas revenir, comme un pressentiment. Étrangement, cela ne faisait pas peur à Maii, peut-être n'avait-elle pas saisi l'ampleur de ce que cela voulait dire. La seule chose qui était sure à ses yeux, c'est qu'elle n'aurait pas pu trouver un meilleur moyen pour se forger sa propre vie, loin de son passé. Simplement seule avec elle-même- quelques inconnus aussi, mais bon, le mot inconnu dit tout-

La jeune femme n'avait pas l'intention de se mêler aux autres, même si elle allait devoir le faire pour sa survie. Après tout, il n'était pas obligatoire de se faire des amis, simplement appartenir à un clan. Bref, l'adolescente décida de se trouver un abri où passer la nuit. Avec bien-sur, un petit feu où elle pourrait chasser et brûler vive sa peur du noir total.

La nuit tombé, Maii alla se réfugier dans un gros monument, sa présence était du moins, plutôt curieuse. De toute façon, ça lui était égale, elle ne comptait pas passer sa vie dans ce monument morne et froid qui accentuerait le creux dans son cœur. Au contraire, Maii devait juste prendre le temps de réfléchir à sa situation, d'écrire et de se reposer.
Sur ces pensées, bien au chaud près d'un petit feu de braise, l'adolescente s'endormit. Les yeux clos, elle semblait si vulnérable. Ainsi, elle ressemblait à un petit chaton qui baisse sa garde...

Leila, attirée par la lumière douce et irrégulière, était entrée dans le temple. Elle marcha en essayant de ne pas faire de bruit. Une jeune fille était endormie à côté d'un feu. Leila ne dit rien, se demandant si elle devait la réveiller ou non. De toute manière, elle avait froid. Elle décida de s'assoir près du feu, à distance respectueuse néanmoins. Discrète, comme toujours.

Lorsque la lumière commença à pénétrer, cela suffit à Maii pour ouvrir les yeux. Elle ouvrit tranquillement les yeux, s'étira puis bâilla un bon coup. Lorsqu'elle fut totalement éveillée, Maii découvrit la fille assise près du feu. Maii garda son calme et son expression habituelle. Ne sachant pas comment aborder les inconnus. La jeune femme se rassie contre la paroi du temple. L’adolescente n’accorda qu’un bref regard à l’inconnu, une femme un peu plus âgée qu’elle, afin de ne pas paraitre impolie. Elle en savait pas quoi dire dans de telles circonstances. Très mal à l’aise, elle dit simplement : «D’où venez-vous?».

D'Inde. Et vous ?

Maii fut légèrement soulagée de détecter le malaise dans les yeux de l'autre femme. Ce ne fut qu'une piètre consolation pour l'adolescente. Malgré tout, elle se ressaisit et répondit:

Je viens du Canada.

Sur ces mots, la jeune femme se rappela les grands monts enneigés en hiver de Vancouver. Elle ignorait pourquoi mais même si elle était ici depuis 5 heures et que le paquebot n'était que quelque peu en retard, elle savait au plus profond d'elle que le paysage qui l'entourait n'était pas temporaire. Ainsi, une pointe de nostalgie monta en elle. Malgré sa vie, plutôt disons-le morne et grise, elle s'ennuyait de sa routine, de sa sécurité. Cependant, Maii s'adapte facilement.

On ne reviendra pas..

Ces mots, si court et prononcé si peu fort sortirent sans qu'elle le veuille vraiment, qu'elle en fit le saut. Comme si ce fut quelqu'un d'Autre qui prononcèrent ces mots... Il était rare qu'elle parlait aux inconnus...

Comment ça ?

Maii s'en voulu tout de suite. Elle ne voulait pas être s'elle qui réduit l'espoir des autres à néant. Cependant, elle avait trop parlé et Maii savait qu'elle ne s'en tirerait pas autrement qu'en disant la vérité. De toute façon, Maii est tout simplement incapable de mentir. Probablement dû à ces yeux, reflets de son âme, qui dévoile tout d'elle.

Un paquebot n'est jamais en retard...Surtout le luxueux et célèbre Queen Mary.
Et aussi, tous ces employés sur le bateau...Ils nous regardaient tous comme si nous étions des victimes, comme si nous devions être dorlotés comme si c'était la dernière fois.

Maii avait beaucoup parlé, contrairement à son habitude, mais ce n'était qu'une infime partie de ce qui se passait dans sa tête..

Leila ne répondit rien, sous le choc. Cela ne pouvait pas être vrai.

Maii s'en voulut tout de go. Elle soupira discrètement et baissa la tête, elle n'aurait pas du, l'adolescenet avait encore gaffée. Elle n'avait pas pensé que les autres personnes sur l'île croyait encore au retour du bateau. Pas que Maii soit d'ordinaire pessimiste, juste réaliste. La jeune femme commença à se mordre l'intérieur de la lèvre. Elle était enrveuse, elle avait peur de se faire envoyer promener par la femme devant elle, apparamment sous le choc. Maii s'en voulait terriblement.. Elle garda la tête baisser,de peur qu'on lise la vérité dans ces yeux.
Je suis désolé...

Je préviens, j'ai eu la permission de changer son nom Monument et désespoir.. 272427

Latika tourna son regard perdu vers l'adolescente. Elle avait l'air très mal à l'aise, presque triste. Elle devait s'en vouloir d'avoir choqué la brune.

Ce n'est rien ! C'est juste que... Ca fait mal.

Fit-elle avec un semblant de sourire. Elle ajouta :

Je m'appelle Latika, et vous ?

Maii garda la tête baissée, mais osa tout de même un regard vers la femme.

Oui, oui..Je comprends..

Répondit-elle, un peu hésitante et ayant peu d'assurance.

L'inconnu, qui s'appelait Latika lui demandait son prénom, avec une sorte de sourire forcée. Maii apprécia tout de même l'effort et tenta de répondre en ayant l'air sympathique, après tout, elle se le devait avec ce qu'elle venait d'annoncer aussi sèchement..

Moi, c'est Maii, Maii Carter.. Enchantée.

Enchantée aussi.

Répondit-elle. Latika faisait rarement la conversation aux gens.

Lorsque la conversation s'éteignit le malaise redevint palpable. Elle attendait une porte de secours, quelqu'un chose qui allait lui permettre de se sortir de cette situation gênante. Non, rien, rien ne lui venait en tête sauf les yeux de la femme qui attendait quelque chose...Maii l'ignorait à vrai dire.

Latika se rapprocha un peu du feu qui brûlait, elle commençait à avoir un peu froid.

Maii ne savait pas comment aborder la conversation.
Elle ignorait quoi dire, le silence ne la gênait pas, mais dans ce cas-ci, étrangement, elle voulait communiquer avec Latika.. ::'(:

Latika finit par reprendre la conversation.

Dis... Vous aviez quoi, comme vie, avant d'arriver ici ?

Elle avait peur de faire une boulette, mais autant se renseigner. Elle avait l'habitude d'être la seule fille avec un passé pas très enviable, mais depuis que Maxime lui avait révélé le sien, elle préférait savoir tout de suite plutôt que faire des gaffes par après.

Assises sur le bord du feu, les genoux repliés et la tête appuyée sur ceux-ci, la question de Latika la surprise. Il était rare que Maii parle de sa vie… À vrai dire, ce n’était jamais arrivé, mais curieusement, sur cette île, elle avait le pressentiment qu’elle allait devoir le faire souvent. Maii toussota, chassa la boule d’émotions et commença.

Jusqu’à l’âge de 5ans, j’ai vécu avec ma mère, mon père et Leah, ma grande sœur. Nous étions une famille complète et aimante. On formait un tout. Un jour, on diagnostiqua un cancer à mère, un de ceux mortel, à vrai dire. Moi et ma sœur restèrent à son chevet jusqu’à sa mort. J’avais peur de ne pas avoir le temps de lui dire au revoir. À l’époque, je n’avais pas compris lorsque mon père nous avait dit au revoir, en disant qu’il ne pouvait vire avec le deuil de notre mère juste avant de téléphoner à une agence d’adoption et de fermer la porte, équipé de médicaments. Dans ce temps, ma sœur avait compris, mais moi j’ai été dans l’ignorance jusqu’à l’âge de 15 ans, ne voulant y croire…

Ce récit, étant exigent pour Maii, dut prendre une grande inspiration, saccadée par le retient des larmes. Elle continua.

Moi et ma sœur résidèrent dans une famille d’accueil. Nous étions des enfants parmi tant d’autres. Heureusement, Leah était là pour moi, elle dut grandir vite pour s’occuper de moi, comme une mère. Lorsqu’elle eut l’âge de devenir mon tuteur légal, nous déménagèrent en appartement. Un jour, ma sœur me quitta.

Maii ne mentionnait jamais le fait qu’elle avait été retrouvée morte, elle préférait dire qu’elle l’avait quitté, c’était moins douloureux. La jeune femme ne jugea pas important de mentionner la présence du petit bracelet qui réchauffait son cœur, autour de son poignet.
Maii durcit les mâchoires en les contractant et retenu ses larmes. Elle ne devait pas pleurer, après tout ce temps, elle ne devait pas retomber dans la déprime. Après tout, les larmes c’est pour les faibles. Et de toute façon, elle n’accepterait jamais qu’une inconnu la voit en larme...

Latika se mordit la lèvre. Elle avait le don pour faire des gaffes. Elle se rapprocha de Maii, malgré elle qui était toujours très timide, et posa sa main sur l'épaule de la jeune fille à la peau claire.

Désolée...

Maii toussota, éloigna ainsi la boule qui s'était formée dans sa gorge et rangea sa peine au plus profond de son cœur, se refusant de la vivre pour l'instant.
Maii fut surprise de l'élan de compassion, Latika n'avait pas dû avoir une vie facile, elle aussi. En Inde, sauf si tu es riche, c'est la misère. Elle se tourna vers l'indienne.

Non, ne le soyez pas, certains vivent beaucoup pire que moi, répondit-elle, en souriant tristement .

Très souvent le seul moyen que Maii avait de s'en sortir était de prendre à la légère sa vie, de la comparer à d'autres phénomènes beaucoup plus graves.

Tout le monde a eu ses propres galères, même si elles ne sont pas de la même force, le résultat est le même.

Répondit Latika avec un petit sourire.

Elle se tourna vers la femme à ses paroles.
Oui, malheureusement.
Cette femme était gentille, dotée d’une gentillesse et d’une bonté naturelle. Parfois Maii enviait les gens. Parfois, souvent, lorsqu’elle voyait une femme très belle elle s’imaginait tous les garçons qu’elle devait attirer. C’était pas une chose que Maii connaissait, n’ayant jamais eu de relation, ni de naissance d’amour envers un homme, excepté sa famille. Parfois Maii s’écrivait une belle relation romantique avec un garçon attentionnée. Le bon garçon. Cependant, dans son carnet, Maii s’était assurée de le décrire de façon si précise que jamais elle ne le trouverait, ne voulant pas avoir de peine.

Elle sourit tristement, reposant son regard sur le feu.

Il faut bien un peu de misère dans le monde pour que quelques privilégiés aient une vie presque parfaite...

Soupira-t-elle. Elle se rappelait les riches hommes d'affaires de Mumbaï, méprisant la population, toujours bien habillés, tout semblait leur sourire dans la vie... Mais elle savait que ce n'était pas vrai, personne n'avait une vie qui souriait sans arrêt.

Comme lisant dans ses pensées, Maii répondit distraitement.

Personne n'a de vie parfaite, c'est impossible. Elle est juste moins douloureuse.

Elle rendit un sourire triste à Latika. Pensant quant à elle, à tous les gens qu'elle avait vus passé dans ses 20 ans de vie. C'était plutôt court, mais de nombreuses personnes avaient eu leur place dans la vie de la jeune femme. Tous, cependant, disparaissaient, laissant Maii dans sa solitude. Mais pas sur cette île, pas dans sa nouvelle vie, ce ne serait pas comme ça! Certainement pas, ça ne pouvait pas se répéter...

Latika hocha la tête, Maii avait raison. Mais tout ça était bien trop pessimiste pour elle, elle ne s'était que rarement plaint de la vie qu'elle menait. Enfin, qu'elle menait avant d'arriver sur l'île.

Tu as raison. Mais bon, ça ne sert à rien de se morfondre, et puis de toute façon, on va rester sur l'île un bon bout de temps.

Maii se ressaisit puis releva la tête et les épaules. Après tout, ici, c'était nouveau, une nouvelle vie. Que du nouveau et du positif.

Oui, l'occasion de tout recommencer à zéro, dit-elle en tournant la tête vers Latika, une lueur optimiste dans les yeux.

Elle avait raison, leur temps ici allait être très long, leur vie entière probablement!